Se retrouver obligé de rembourser un prêt dont on s’est porté caution peut être une situation inconfortable. Particulièrement si vos moyens ne vous permettent pas de faire face à votre engagement. Pas de panique, la justice peut annuler le cautionnement d’un prêt en cas de disproportion par rapport à vos revenus.
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ToggleDéfaut de remboursement : la banque assigne les cautions
L’histoire commence en Martinique où un entrepreneur obtient un prêt professionnel auprès de la Bred Banque Populaire, mais à condition qu’il se porte caution.
Puis les choses ne se déroulent pas comme prévues. La société ne peut plus rembourser, la déchéance du contrat est prononcée et la banque se tourne vers les cautions solidaires. Problème : les échéances réclamées par la Bred représentent 90 % des revenus de la caution.
Le chef d’entreprise se tourne alors vers un avocat spécialiste de ce genre de situation. Me Anthony Bem choisit d’invoquer la disproportion entre l’engagement de la caution et ses revenus, comme il le rapporte sur Legavox.
L’inopposabilité annule la caution d’un prêt
En droit, l’inopposabilité signifie l’impossibilité de faire valoir l’obligation d’un contrat, sans pour autant en contester la validité. C’est ce qu’a reconnu le tribunal de grande instance de Fort-de-France le 7 avril 2018, en retenant le caractère disproportionné de l’engagement de la caution face à ses revenus.
L’article L332–1 du Code de la consommation oblige effectivement le créancier professionnel à s’assurer que l’engagement de la caution est bien proportionnel à ses revenus. Si la banque prêteuse n’établit pas de ratio de remboursement, elle en sera de sa poche par la suite, un règle qui vaut aussi pour les crédits à la consommation.
Dans cette affaire le chef d’entreprise s’était porté caution pour un prêt de 615 000 € sur 15 ans, au taux de 4,20 %. Même avec un patrimoine de 220 000 € et des revenus mensuels de 4903 €, les échéances de 4826 € réclamées par la banque étaient purement disproportionnées.
Pour info : la Cour de cassation a rendu un arrêt le 19 janvier 2022, qui précise quel est le patrimoine dont il faut tenir compte pour apprécier la disproportion du cautionnement.
Demander une caution pour un prêt : les obligations de la banque
La notion de proportion entre l’engagement financier d’une caution et ses revenus, est clairement établie par la jurisprudence.
Tout d’abord la banque prêteuse doit s’assurer que l’engagement financier de la caution ne dépasse pas 35 % de ses revenus (assurance emprunteur incluse), exactement comme dans le cadre du calcul du taux d’endettement. En supplément, la charge financière annuelle que représentent les crédits bancaires déjà souscrits par le particulier, doivent représenter moins de 4 fois son revenu annuel.
Toutefois Il est difficile à croire que les banques vont effectivement respecter ces conditions. En premier lieu parce que beaucoup d’entre elles n’en ont pas entendu parler. En second lieu parce qu’elles ont l’habitude de prendre des risques d’abord, et de réfléchir après.
Cet épisode souligne qu’un particulier doit bien peser sa situation, avant de s’engager à rembourser un prêt bancaire en cas de défaut de l’emprunteur. Certes la jurisprudence lui donnera désormais raison si ledit prêteur a mal jaugé sa capacité de remboursement. Mais la procédure peut durer des années, comme le montre cet exemple.